En 2007, Ubisoft s’apprête à lancer Assassin’s Creed, un jeu qui deviendra un pilier du catalogue de la firme et qui installera la franchise pour les années à venir. Derrière l’apparente sérénité d’un lancement maîtrisé, l’équipe vivait pourtant une course contre-la-montre qui aurait pu faire basculer l’histoire.
Le projet touche à sa fin. Le moteur graphique, alors flambant neuf, affiche des cités vivantes, des toits praticables, des foules crédibles. Sur le papier, tout est prêt. Mais lorsque le fils d’Yves Guillemot, PDG d’Ubisoft, pose les mains sur la manette, le constat tombe : Assassin’s Creed est magnifique, mais vide. À quelques jours de graver les disques, la décision est prise : ajouter du contenu pour donner vie à l’univers.
Le jour où Ubisoft a ajouté des quêtes secondaires… à cinq jours du lancement
Charles Randall, lead AI designer à l’époque, se souvient de cette semaine où l’équipe fut littéralement enfermée dans une pièce pour concevoir en urgence des quêtes secondaires. Pas de place pour l’erreur : le jeu devait partir en pressage immédiatement après, sans possibilité de patch de correction. À l’époque, pas de patch day one pour rattraper le tir. Ce qui partait sur le disque restait sur le disque, pour le meilleur ou pour le pire !
Ces missions annexes, qui invitaient les joueurs à assassiner des cibles secondaires ou collecter des drapeaux, n’étaient pas prévues au départ. Elles ont été intégrées dans l’urgence, sans la possibilité d’un second test approfondi. Pour Charles Randall, ce choix reflète un constat lucide : Assassin’s Creed était avant tout une vitrine technologique, et manquait alors de substance pour retenir le joueur au-delà de sa quête principale.
Un lancement historique, malgré des cicatrices de développement
L’ajout précipité de ces quêtes n’a pas été sans conséquences. Parmi les anecdotes devenues légendes, un bug faisait disparaître les cibles dans le sol si le joueur approchait par le mauvais angle, validant l’assassinat sans octroyer le crédit nécessaire pour débloquer certains trophées. Un défaut qui résonne particulièrement dans un jeu où la complétion participait déjà à l’engagement des joueurs dans ce monde ouvert encore jeune.
Malgré ces turbulences, Assassin’s Creed a marqué l’industrie, tant par son ambition que par son audace technique. Ce chapitre méconnu rappelle que derrière chaque lancement historique, il y a des nuits blanches, des décisions de dernière minute, et des risques qui façonnent la légende d’un jeu.