Lorsque l’on évoque les tueurs en série les plus tristement célèbres, Ted Bundy s’impose immédiatement. Entre 1974 et 1978, il a agressé, violé et tué des dizaines de jeunes femmes aux États-Unis, se forgeant l’image d’un prédateur méthodique caché derrière un visage de gendre idéal. Condamné à mort en Floride, il a été exécuté le 24 janvier 1989 après un procès très médiatisé qui a cristallisé la fascination et l’effroi qu’inspirait son parcours. L’ampleur de ses crimes, ses évasions et sa stratégie de défense en ont fait un cas d’école du true crime et un objet d’étude pour la criminologie moderne.
Dans l’ombre de cette histoire, une autre réalité, plus discrète, interroge : Ted Bundy a eu une fille, née en 1981 de sa relation avec Carole Ann Boone, rencontrée des années plus tôt et devenue son épouse lors d’une audience en Floride. Longtemps désignée sous le nom de Rose Bundy (parfois « Rosa » selon certaines sources), l’enfant est venue au monde alors que son père était déjà incarcéré et promis au couloir de la mort.
La naissance de Rose Bundy au cœur du couloir de la mort
Lorsque Carole Ann Boone tombe enceinte de Ted Bundy, le tueur est déjà incarcéré dans une prison de haute sécurité en Floride. À cette époque, aucune visite conjugale n’est autorisée, et la simple idée qu’un détenu dans le couloir de la mort puisse concevoir un enfant semble impossible. Pourtant, le 24 octobre 1982, une petite fille voit le jour : Rose Bundy.
La manière dont elle a été conçue reste entourée de mystère. Carole Ann Boone aurait confié, des années plus tard, que certains gardiens détournaient le regard pendant les visites, permettant à Ted Bundy et à elle de s’isoler brièvement “dans la salle de bain” ou “derrière un distributeur d’eau”. D’autres versions évoquent une complicité tacite de la part de quelques employés pénitentiaires, fascinés par le charisme du tueur.
Quelle que soit la vérité, la naissance de Rose Bundy symbolise l’une des plus étranges contradictions de l’histoire criminelle américaine : celle d’un homme coupable de meurtres d’une extrême violence, mais qui, jusqu’à la fin, a cherché à se présenter comme un mari et un père aimant.
Pour Carole Ann Boone, cet enfant représentait l’espoir d’un avenir malgré tout possible, la preuve que Ted n’était pas que le monstre que l’Amérique voyait en lui.
Les rares visites de Rose à son père en prison
Très peu d’informations fiables existent concernant les visites de Rose Bundy à son père pendant son incarcération. Les archives officielles de la prison de Floride ne mentionnent pas précisément la fréquence ni les conditions de ces rencontres. Ce que l’on sait, en revanche, c’est que Carole Ann Boone aurait rendu visite à Ted Bundy avec sa fille à plusieurs reprises avant leur séparation en 1986.
De rarissimes clichés, pris dans le parloir, montrent Ted Bundy tenant sa fille dans ses bras, un sourire aux lèvres. Ces photographies, diffusées à titre d’archives dans certains documentaires, suscitent un profond malaise. Le contraste entre l’image d’un père apparemment tendre et celle du tueur méthodique qu’il était crée une dissonance dérangeante.
La réalisatrice Trish Wood, à l’origine du documentaire Ted Bundy: Falling for a Killer disponible sur Prime Video, a d’ailleurs évoqué ce sentiment en expliquant qu’elle avait eu une réaction viscérale en découvrant ces images, allant jusqu’à dire qu’elle aurait voulu “retirer l’enfant de l’image”.
Ces clichés, rares et chargés d’ambiguïté, rappellent à quel point Rose Bundy est devenue malgré elle le symbole d’un paradoxe tragique : celui d’une innocence née au cœur de l’horreur.
Rose Bundy, une vie sous une nouvelle identité
En 1986, tout bascule. Carole Ann Boone finit par admettre ce qu’elle refusait de voir : Ted Bundy est bel et bien coupable. Les aveux tardifs de Ted Bundy, prononcés alors qu’il attendait son exécution, viennent briser définitivement le mythe de l’époux mal compris. Elle divorce, quitte la Floride et part s’installer avec Rose et son fils Jamey dans l’État de Washington, loin des caméras et des tabloïds.
Pendant plus de trente ans, aucune information vérifiable ne circulera sur elle. Ce n’est qu’en janvier 2018 que la presse américaine révélera, de manière très discrète, que Carole Ann Boone est décédée. Elle aurait succombé à un choc septique dans une maison de retraite de l’État de Washington, à l’âge de 70 ans.
Aujourd’hui, Rose Bundy n’a plus aucun parent vivant. Après avoir grandi à l’abri des regards, elle a changé d’identité pour se soustraire à l’héritage de son nom, tout comme David Dahmer, le frère du tueur en série Jeffrey Dahmer, qui a lui aussi choisi de disparaître totalement des radars et de vivre sous une nouvelle identité. Âgée de 43 ans, Rose Bundy demeure introuvable.
Aucune information vérifiable ne circule à son sujet : ni photo, ni adresse, ni trace numérique.
Personne ne sait où elle vit, ni même si elle utilise encore son véritable prénom. Ce silence, entretenu depuis plusieurs décennies, représente peut-être sa plus grande victoire : avoir échappé à la malédiction du nom Bundy.
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