Le jeu vidéo sur PC est-il devenu un luxe ? Autopsie d’une flambée des prix

Oubliez la "PC Master Race". Aujourd'hui, monter une config digne de ce nom demande de vendre un rein, et peut-être même un bout de foie. Entre des cartes graphiques au prix d'une voiture d'occasion et une RAM qui flambe à cause de ChatGPT, le gaming sur PC est-il en train de devenir un luxe indécent ?

Le jeu vidéo sur PC est-il devenu un luxe ?
© Rockstar Games
Le jeu vidéo sur PC est-il devenu un luxe ?

Vous vous souvenez de cette époque bénie ? Celle où l'on pouvait se moquer (gentiment) des "consoleux" et de leurs machines bridées, tout en montant un PC de guerre pour 800 balles ? C’était le bon temps. Aujourd’hui, avec 800 euros, vous avez à peine le boîtier, l’alim et un SSD pour installer Windows. Pour le reste, il va falloir manger des pâtes. Beaucoup de pâtes.

Le constat est amer : le jeu sur PC est en train de devenir un loisir de luxe. Fini le temps de la débrouille, place à la sélection par l'argent. Le ticket d'entrée a tellement explosé que notre plateforme préférée ressemble de plus en plus à un club VIP inaccessible. Voyons un peu comment on en est arrivé à ce braquage.

L'indécente flambée des cartes graphiques

Attaquons directement le sujet qui fâche, celui qui plombe à la fois l'ambiance et le budget, j'ai nommé la carte graphique.

Souvenez-vous qu'il y a dix ans, le Graal s’appelait GTX 1080. Pour environ 600 à 700 euros, vous touchiez l'excellence du bout des doigts. Sauf qu'aujourd'hui, l'inflation technologique a totalement perdu la raison. Une RTX 4080 dépasse allègrement les 1 200 euros, tandis que le monstre absolu, la RTX 5090, franchit sans honte la barre des 2 000 euros. Le tarif a donc doublé, voire triplé, alors que votre fiche de paie, elle, n'a probablement pas suivi la même courbe exponentielle.

  • Le pire est que NVIDIA ne fait même plus semblant. Il suffit de lire leurs bilans comptables pour comprendre que le jeu vidéo est devenu de l'argent de poche face à la vraie manne financière des "Data Centers". La logique est d'un cynisme absolu. Pourquoi s'embêter avec un gamer qui chipote quand on peut vendre une puce H100 à 30 000 dollars à Google ou Microsoft ?

Pour nous, la sanction est immédiate. Cette flambée des prix a créé une situation grotesque où les éditeurs semblent vivre dans un fantasme technologique. Ils conçoivent désormais des titres pour des machines de la NASA, oubliant que la réalité du terrain est bien plus terre-à-terre. Il suffit de jeter un œil à l'enquête matérielle de Steam pour constater que le « peuple du PC » ne joue pas sur des RTX 4090.

La majorité s'accroche encore à des modèles de milieu de gamme comme la RTX 3060, voire à de vénérables GTX 1650, faute de budget pour suivre la cadence infernale imposée par l'industrie. Le fossé se creuse donc inexorablement au sein même de notre communauté. D'un côté, une élite restreinte profite du Ray-Tracing en 4K. De l'autre, la masse silencieuse baisse la résolution en priant pour que le jeu ne plante pas.

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NVIDIA UNSPLASH

L'IA a mangé votre RAM

Vous vous dites peut-être qu'il suffit de rajouter un peu de RAM pour compenser, persuadé que c'est l'amélioration "budget" par excellence. Grossière erreur.

Si vous avez jeté un œil aux tarifs de la DDR5 récemment, vous avez forcément senti cette goutte de sueur froide perler sur votre front. Les prix ont littéralement déraillé, grimpant de 15 à 20 % en à peine quelques mois. Et ce n'est PAS terminé. Mais ne cherchez pas le coupable bien loin, c'est encore et toujours l'IA.

Le mécanisme est d'une cruauté mathématique. Pour faire tourner leurs modèles voraces, les industriels réclament de la mémoire HBM, bien plus complexe et surtout infiniment plus rentable à produire.

Face à cette mine d'or, des géants comme Samsung ou SK Hynix ont vite fait leur choix en convertissant leurs lignes de production au détriment de la DDR5 classique. Le message est clair : "ciao les gamers". Résultat des courses, vous ne payez plus le prix du silicium. Vous payez le prix de la rareté, car votre barrette de RAM a été sacrifiée sur l'autel de l'Intelligence Artificielle.

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RAM UNSPLASH

Des jeux toujours plus chers et moins finis

Une fois que vous avez hypothéqué un rein pour le matériel, il reste encore à nourrir la bête. Malheureusement, le passage en caisse pour les jeux n'est guère plus doux. Le standard des grosses productions s'est désormais confortablement installé autour des 60 euros, sans parler des éditions "Ultimate" qui dépassent allègrement la centaine d'euros juste pour vous offrir trois jours d'accès anticipé.

Même constat pour les abonnements, en particulier le Game Pass, longtemps présentés comme la solution miracle pour jouer à petit prix, voient leurs tarifs grimper de manière significative.

Heureusement, tout n'est pas noir au pays du clavier-souris. Le véritable salut vient souvent de la scène indépendante qui, loin de ces délires inflationnistes, continue d'offrir des pépites à tarifs humains (coucou Clair Obscur, Hollow Knight, Blue Prince... on vous aime). C'est la bouffée d'oxygène qui nous rappelle pourquoi on aime cette plateforme.

Le PC garde d'ailleurs un atout maître dans sa manche face aux consoles. Contrairement à un écosystème fermé comme celui de PlayStation et Nintendo où les prix restent souvent verrouillés au niveau maximum, le PC demeure un marché ouvert et férocement concurrentiel. Entre les soldes saisonniers de Steam, les jeux offerts par Epic ou la guerre des prix entre revendeurs, les opportunités de faire des affaires sont quotidiennes. Si le ticket d'entrée matériel est devenu élitiste, le logiciel reste paradoxalement plus accessible pour celui qui sait fouiner, prouvant que notre plateforme a encore de beaux restes.

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Hollow Knight Silksong Team Cherry

La liberté et le format portable pour sauver les meubles

Le PC est-il mort ? Non. Mais son esprit "ouvert et accessible" est en soins palliatifs. Ironiquement, alors qu'on se moquait des consoles, une PS5 (même Pro) ou une Xbox Series X ressemble aujourd'hui à une affaire en or comparée à un PC équivalent. Mais finalement, le salut vient peut-être de ces nouvelles consoles portables, comme le Steam Deck, qui prouvent qu'on peut encore profiter de sa bibliothèque sans vendre un organe.

Il ne faut pas non plus oublier l'atout maître du PC face à ses concurrents de salon. Contrairement aux consoles qui vous réclament une rente mensuelle juste pour jouer en ligne avec vos amis, le multijoueur sur PC reste ce qu'il doit être : gratuit. Ajoutez à cela une rétrocompatibilité absolue qui transforme votre machine en musée vivant capable de lancer un titre de 1998 comme une nouveauté de 2025, et vous comprenez pourquoi, malgré le braquage financier en cours, on a toujours autant de mal à quitter le navire.

Et vous, vous avez craqué votre PEL pour une upgrade cette année ou vous faites de la résistance avec votre vieille config ?

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